22.8.10

MAX – Michel Quint

Le principal intérêt de ce roman de Michel Quint, outre son indéniable et habituelle qualité littéraire dont l’auteur est un habitué, est de nous donner à voir l’Histoire sous un angle profondément humain, à travers le drame personnel qui secoue une jeune femme en pleine seconde guerre mondiale.

Le parti-pris de l’auteur est de faire cohabiter deux histoires parallèles pour mieux mettre en évidence les multiples difficultés de la Résistance française qui tente de se mettre en place, de façon plus ou moins chaotique, sous l’occupation nazie de plus en plus oppressante.

D’un côté, il y a Agathe, cette toute jeune femme de vingt et un ans jetée sur les routes de l’exode où elle verra sa mère mourir dans ses bras, victime des bombardements. Agathe débarque à Lyon, envoyée par son père resté à Lille pour être prise en charge par une famille d’amis. Malheureusement, une fois sur place, elle trouvera porte close et ne devra son salut qu’à un jeune garçon, Maurice, qui l’hébergera et avec lequel une grande passion ne tardera pas à se développer. Maurice est fils de pétainistes. Mais, à la différence de ses parents, il s’est engagé dans la Résistance et y entraînera Agathe.

De l’autre, il y a Jacques Martel, alias Jean Moulin, alias MAX. Du côté de la lumière, Jacques est galeriste à Nice et vit à Lyon dans une petite chambre dans le même immeuble qu’Agathe. Du côté de l’ombre, il y a l’ancien préfet de Chartres, celui qui en Juin 40 s’est juré de combattre l’ennemi, de ne pas laisser la France tomber dans un pétainisme voué à l’échec, celui qui se voit bientôt nommé Ministre plénipotentiaire par le Général de Gaulle, chargé de fédérer les multiples groupes de Résistance en vue de la Libération et de préparer la voie à un nouveau pouvoir politique d’après-guerre.

Agathe et Jacques se croisent, jouent au chat et à la souris. Tous deux sont passionnés d’Histoire et Agathe prépare le concours à l’Agrégation en s’étant fait une spécialité des empereurs romains et de leur pouvoir tyrannique dans lequel elle voit le symbole de la France dans laquelle elle vit d’où la nécessité d’un engagement. Jacques est un homme à femmes, qui voit en Agathe une belle jeune femme, bientôt délaissée par son amoureux Maurice. Il ne saura rien de l’arrestation de ce dernier et de son suicide en prison pour échapper à la torture et ne point dénoncer son réseau et, surtout, Agathe, leur agent de liaison.

On y voit aussi, et c’est la partie la plus intéressante, la somme des conflits internes à la Résistance, la lutte permanente entre les Communistes qui ne veulent pas d’une unité poussée par l’Angleterre et De Gaulle, les partisans de coups de force permanents visant à tuer du boche à tout prix au risque de précipiter les actions de rétorsion et de décimer une résistance encore balbutiante. On y voit les trahisons politiques, les conflits personnels pour se faire une place au soleil, évincer Max devenu gêneur au risque de faire le jeu de l’ennemi.

Ces deux mondes cohabitent, celui de la résistance des petits, héros anonymes et qui tombent sous les coups de l’ennemi souvent trahis par les siens, celui des politiques qui tentent de s’organiser tout en voulant conserver par devers eux le plus de pouvoir possible et faire le jeu de ceux pour qui, plus ou moins consciemment, ils travaillent qu’ils soient Russes, Américains ou Anglais.

Au bout du compte, il en résulte un roman profondément humain et qui permet d’envisager l’Histoire sous son côté sombre, non officiel et peu glorieux.

Publié aux Editions Perrin – 2008 – 243 pages