22.10.11

Si ce livre pouvait me rapprocher de toi – Jean-Paul Dubois


Ce roman se situe dans la suite des romans de type « américain » de la production de JP. Dubois. Comme dans « Hommes entre eux », le roman se déroule en introduction en France, à Toulouse, et essentiellement dans le grand Nord Canadien.

Le personnage principal vit une époque de remise en question majeure. Il a appris quelque temps auparavant qu’il ne pouvait avoir d’enfants, son épouse l’a largué et il vit une séparation qui l’amène à tout remettre à plat.

Le récit est conduit à la première personne du singulier et est conçu comme une sorte d’autoanalyse a froid, une fois digérés les grands bouleversements engendrés par les découvertes successives que l’auteur fait sur lui et son père, décédé. Le narrateur est par ailleurs écrivain ce qui lui valait une forme de condescendance de la part de ses ex beaux-parents, américains.

Parce qu’il est en manque d’inspiration, en plein doute sur lui-même, le personnage principal décide de partir sur les lieux où son père a disparu brutalement en se noyant lors de l’une de ses parties de pêche sur un grand lac canadien auxquelles il consacrait l’intégralité de ses vacances.

Peu à peu, il va découvrir la vie cachée de son père et remonter sur ses traces. Il agit par impulsions successives, sans plan, se laissant guider par l’inspiration du moment, une suite de rencontres qui agissent comme autant de détonateurs pour l’amener à s’interroger sur ce qu’il est lui-même.

Le roman fait souvent penser à « Hommes entre eux » : même unité de lieu, même impact de la nature qui est au centre d’une vie rude (dans la neige dans « Hommes entre eux », sur l’eau et dans la forêt quasi impénétrable dans ce roman). Même recherche de l’être perdu (la compagne dans le roman le plus tardif, le père ici), même déchainement de violence. La scène de la chasse à l’arc de l’origan et le dépeçage qui s’en suit est d’un réalisme extraordinaire.

Mais ici, la violence est plus tournée vers le narrateur lui-même qui va se livrer à une traverser des bois profonds, réputés infranchissables pour prouver aux yeux d’un père absent et dissimulateur qu’il a eu tort de ne pas considérer son fils à sa juste valeur. C’est au prix de la faim, de la soif, de la souffrance physique, du délire entrainé par les fièvres que cette preuve ultime et tardive devra être arrachée. C’est le prix à payer pour se rapprocher du père omniprésent dans la pensée mais physiquement absent, pour obtenir son amour posthume.

Le livre possède un impact narratif et psychologique remarquable. Il est impossible de s’en extraire tant la logique d’un parcours pourtant si personnel vous prend aux tripes. Chaque découverte pousse encore plus loin les limites d’un personnage en reconstruction qui doit apprendre à s’assumer au sein d’un environnement personnel dont la réalité le percute.

Il en résulte un superbe roman, fort et qui marque le lecteur durablement. A lire impérativement !


Publié aux Editions de l’Olivier – 211 pages