26.3.13

L’homme seul – Bernardo Atxaga



Une fois refermé cet assez épais roman, on ne peut s’empêcher de penser que l’intrigue et le thème, solides, ont été desservis par une écriture insuffisamment maîtrisée et une  succession d’erreurs de procédés littéraires. A force d’être trop riches, certains plats deviennent indigestes et finissent par produire l’exact effet inverse de celui recherché, et c’est bien le sentiment que donne ce roman basque.
L’intrigue est assez simple et se déroule sur une petite semaine. Un groupe de cinq ex-militants de l’ETA possède un hôtel aux portes de Barcelone. Après avoir mené des actions armées violentes allant jusqu’à l’exécution d’un otage, ils ont été emprisonnés puis amnistiés au moment où l’Espagne démocratique a cherché à normalisé la situation. C’est avec l’argent collecté lors de deux braquages de banques, commis immédiatement après leur sortie de prison. Grâce à une magouille financière, ils ont fait transiter l’argent par le frère du chef de réseau que ce dernier a, au passage fait interner dans une clinique psychiatrique, pour son bien et celui du groupe. Bref, un petit monde peu recommandable et discrètement dissimulé sous des dehors rangés.

Nous sommes en pleine coupe du monde de football. L’équipe de Pologne, jusqu’ici brillante, est basée dans cet hôtel calme et isolé de la ville.

Un couple de militants de l’ETA vient de commettre un attentat à Bilbao qui a tué un jeune enfant. Carlos, le chef de l’ex-réseau, par amitié et alors qu’il semble avoir coupé tout lien idéologique avec des idées qui ne menaient nulle part, a accepté de planquer ces dangereux individus recherchés par toute la police d’Espagne. Une décision qu’il a prise seul, sans consulter ses amis.

Alors que le couple devait planquer quelques jours, le temps passe et l’organisation ne donne pas son feu vert à leur extraction. Bientôt, la garde policière qui semblait là pour protéger l’équipe de football, se transforme en garde militaire. Une équipe de pseudo-journalistes débarque et ne compte que de redoutables enquêteurs de la brigade anti-terroristes. Une course contre la montre va s’engager entre Carlos, ses amis à qui il va tantôt mentir, tantôt avouer, leur faisant courir le risque de tout perdre, et les flics.

Bref, c’est du solide. Malheureusement, le livre se perd dans de multiples méandres. Il démarre sur un rythme d’une insupportable lenteur qui, plus d’une fois, m’ont mené aux bords de l’abandon. Ce n’est que vers la cent cinquantième page que tout s’accélère et que l’intrigue devient haletante.

Du fait de la profusion des personnages, embraqués dans des histoires parallèles, souvent sentimentales, on a souvent du mal à suivre le droit fil. En outre, l’auteur ne cesse de faire des incursions dans les références philosophiques du mouvement en citant de longs passages de Rosa Luxembourg et de penseurs trotskystes qui ont nourri le mouvement de l’ETA. Des voix s’adressent en permanence à Ugarte : celle de son mentor, mort au combat, celle « du Rat », sa mauvaise conscience, celle de son frère, emprisonné à vie par lui.

Tout évolue et se croise et s’entrecroise. De longs passages inutiles, de trop nombreux dialogues pauvres, de trop fréquentes images littéraires maladroites finissent par gâter le roman qui laisse un goût amer.

Publié aux Editions Christian Bourgeois – 382 pages