27.1.17

Dans un miroir obscur – Jostein Gaarder


Jostein Gaarder s’est fait une spécialité du roman philosophique aux confins du fantastique et de l’onirique. « Dans un miroir obscur » constitue une excellente opportunité de découvrir cet auteur norvégien original dont le titre le plus connu, et qui fut un gros succès de librairie, est « Le Monde de Sophie ».

En cette soirée de Noël, Cécilie est seule allongée dans sa chambre. Nous comprendrons bien vite que Cécilie, une petite fille intelligente et sensible, est atteinte de leucémie et que la maladie progresse à une vitesse foudroyante. Cécilie surveille les bruits des préparatifs de ses parents et grands-parents aimants et se fait une joie à la perspective de recevoir des cadeaux, une paire de skis, une luge, qui disent avec force sa volonté de guérir et d’un retour à une vie normale.

Cependant, Cécilie ne cesse de s’affaiblir. Plus les jours passent, plus les périodes d’éveil sont courtes jusqu’à ce que l’ange gardien de la petite fille, Ariel, surgisse dans la chambre et se manifeste auprès d’elle, sans crier gare.

Commence alors une série de dialogues entre Ariel et celle qu’il doit veiller, des dialogues poétiques et profonds pour tenter de comprendre ce qui fait la différence entre la vie éternelle des anges dépourvus de toute capacité à user des cinq sens magiques humains et le passage éphémère mais riche en expériences des humains sur Terre.

Ces dialogues abordent, en les survolant car Cécilie n’est après tout qu’une petite fille, les sujets graves de la vie. Cécilie progressera ainsi dans sa compréhension du monde et se préparera à une mort inéluctable.

Comme Ariel, et l’auteur, sont aussi des êtres au grand cœur, Ariel saura faire bénéficier à Cécilie, la nuit venue et la maisonnée endormie, de courts moments de délire à l’extérieur pour faire une ultime descente à ski ou une partie délurée de glissades en luge. Cécilie en sortira de plus en plus affaiblie mais sereine. Elle notera dans son cahier chinois, son journal intime, les propos très adultes qu’elle aura entendus d’Ariel et tentera de livrer à ses parents certains des secrets du monde. Mais ils seront incapables de comprendre les propos inspirés d’un ange que seule Cécilie perçoit. Quelle est la part du conscient, celle du rêve ou de l’inconscient ? L’auteur se garde bien de nous influencer dans notre interprétation de ce qui se passe.

L’essentiel sur la vie sera dit dans ce court roman sensible et intelligent bien que clairement superficiel. Un petit conte philosophique pour nous donner à comprendre que la vision du monde que nous avons-nous appartient en propre et qu’elle nous apparaît confusément dans un miroir obscur qui nous renvoie l’image que nous souhaitons avoir de nous-mêmes.


Publié aux Editions Seuil – 1997 - 169 pages